PRISONNIÈRE D'UNE VIE QUI N'EST PAS LA SIENNE.

C’était un matin froid malgré que le calendrier annonçait le début du mois d’avril. L’hôpital de Paris, la capitale française, était tout aussi froid que le temps, avec ses murs gris et impersonnels à l’extrême. Pourtant, nombreuses étaient les femmes qui venaient accoucher dans cet endroit, sûrement pas par choix. L’une d’elles était Lily Martin, autrement dit la ravissante épouse de James Martin, un ambassadeur connu et reconnu. Ce couple, en vacances à Paris, dans leur pays d’origine, tentait d’échapper à la cohue des derniers évènements en Afrique du Sud, pays dans lequel James représentait la France, avec brio. Durant cet accouchement, disons le un peu chaotique, deux petites filles naquirent et respectivement prénommée Cécélia Romie Martin et Poésy Rudy Martin. Malgré encore six longues années heureuses passées en Afrique du Sud comme une famille aimante et unie, le couple se déchira au milieu de cri, de pleurs et de coups. Incompréhensibles pour les deux jumelles semblables comme deux gouttes d’eaux, elles se réfugièrent dans les bras de l’autre, en espérant que le calme reviendrait vite. Cette situation se perpétua encore pendant une longue année, dans la noirceur de leur foyer car, quand il s’agissait de montrer aux médias, aux autres hommes politiques et à leurs familles que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, le couple savait faire semblant, à tel point que les jumelles diront plus tard « Ils méritaient un oscar !»

Après leur séparation, ne s’entendant plus sur rien y compris la garde de leur enfant, comme leurs biens communs, ils se répartirent les jumelles, bien décidé à montrer à l’autre qu’il était le meilleur pour éduquer leurs filles. Cécélia Romie alla avec sa mère aux Etats-Unis et Poésy Rudy partit pour les Emirats Arabes Unis avant de s’installer en Egypte avec son père. Pendant les dix années suivantes, à vrai dire jusqu’à leurs seizième anniversaire, les seules contacts qu’a eut Poésy avec sa mère et sa sœur se résumait à un week-end tout les trimestres et a une semaine pendant les grandes vacances, autrement dit pas grand-chose. Cécélia Romie ne voyait son père qu’au même régime que sa sœur, également. A vrai dire, pour leur anniversaire de leurs douze ans, Cécélia Romie reçut une lettre de sa petite sœur qui voulait reprendre contact avec elle. C’est ainsi, à cette même période, qu’elles ont instauré, sans que leurs parents puissent leur interdire la chose, de partir un mois dans un camping, le Lagon Bleu, le camping de leur enfance, pour partager du temps ensembles, en plus des nombreux appels qu’elles se passent au cours de l’année.

Poésy est une fille combattante puisque son père la toujours poussait à devenir la meilleure, la première dans tout y compris dans la vie de tous les jours. Etudiante en droit, la jeune femme voulait marcher sur les traces de son père mais en fin de compte, depuis six mois, elle ne se voit pas devenir la même personne que lui, une personne qui a abandonné son mariage – elle est depuis peu convaincue que son père ait tout fait pour faire échouer son mariage – sa famille – il n’a jamais cherché à connaître son autre fille et en ce qui la concerne, il s’amuse à la pousser à bout et croit que la rendre meilleure que tout le monde peut remplacer son amour. Poésy déteste son père surtout depuis qu’il la force à rencontrer ce type, le fils d’un ami, un ami qui pourrait bien le propulser plus haut dans sa carrière politique. Et comme depuis ses six ans, seule la natation synchronisée peut aider la jeune femme à se vider la tête, méthode qui lui a permis à rentrer dans l’équipe de France. Au début, elle ne voulait pas le dire à son père pour ne pas entendre son sempiternel discours sur la réussite et que cette victoire elle lui devait mais en fin de compte, puisque malgré tout il reste son père, elle lui a annoncé que son rêve venait de se réaliser. Poésy ne s’attendait pas à des effusions de joie mais simplement à un sourire. Son père ne semblait même pas concerné ni surpris par l’annonce de cette nouvelle. Après une petite enquête de sa part, ou plutôt de son détective privé – comme quoi cela avait quand même du bon d’être la fille d’un ambassadeur – elle découvrit que c’était grâce à son père qu’elle avait réussi à rentrer dans cette équipe, et non pas grâce à son travail fourni. Ni une ni deux, elle quitta l’équipe et depuis ce jour, elle a définitivement coupé les ponts avec son père pour venir se réfugier dans les bras de sa sœur, ici au lagon bleu.